Quel que soit l’âge de l’église, un coq en métal est souvent placé au-dessus du clocher. Pourquoi une volaille bénéficie-t-elle d’une telle position privilégiée ? La réponse se trouve dans le symbole que représente cet animal dans le christianisme médiéval.
Chaque clocher d’église est unique par son plan, son architecture et ses matériaux, mais une chose ne change pas : le coq métallique posé à son sommet. Souvent accompagné d’une girouette, il pivote selon la direction du vent. Les explications données à cet animal haut perché sont aussi variées que les couleurs de son plumage. Je vais donc faire le tri entre les bonnes et les mauvaises raisons.
Cliquez sur le bouton Play (le triangle blanc) pour écouter l’épisode. Vous pouvez aussi le télécharger sur votre ordinateur, votre tablette ou votre téléphone en cliquant avec le bouton droit ici puis en enregistrant le fichier.
Durée : 5 mn. Taille : 5 Mo. Musique de fin : Unwoman / His, Yours, Mine
Des coqs partout
Faites l’expérience vous-mêmes. Visitez plusieurs églises, grandes ou petites. À la pointe du clocher ou de la flèche, un coq fait le beau. Bien rare si vous trouvez autre chose. Parfois, des monuments se contentent d’une croix ou se terminent par une statue.
Mais, dans l’écrasante majorité des cas, vous verrez un coq en métal, souvent en cuivre. Il arrive qu’une dorure le fasse scintiller au soleil et le rende encore plus visible. Jamais, ou presque, l’animal ne déploie ses ailes. Il est sagement posé sur son perchoir, face au vent.
Et ce totem animal existe depuis des siècles. C’est une tradition très ancienne. On sait qu’en l’an 820, un évêque d’Italie fait forger un coq pour le placer en haut de sa cathédrale. À la fin du Moyen Âge, on devine que les coqs sont nombreux d’après les récits de catastrophes naturelles : des témoins racontent la foudre s’abattre sur le clocher et consumer le coq qui l’orne.
Fausse piste : saint Pierre et le coq
Pour comprendre la signification du coq, on nous sert souvent l’histoire de saint Pierre. Vous connaissez peut-être l’épisode, qui est relaté dans l’Évangile de saint Luc. Trahi par Judas, le Christ est arrêté sous les yeux des apôtres. Deux hommes et une femme remarquent à voix haute que Pierre faisait partie du groupe autour de Jésus. À chacun, Pierre répond lâchement qu’il ne connaît pas cet individu. Après ces dénégations, un coq se met à chanter. La prophétie de Jésus s’est réalisé qui disait : « Avant que le coq ne chante aujourd’hui, tu m’auras renié trois fois ».
Cette histoire n’explique en rien le symbolisme du coq. Elle sert simplement à donner un marqueur temporel au lecteur. Écrire que Pierre a réfuté connaître le Christ avant le premier chant du coq, c’est une façon de dire que tout s’est passé avant l’aube.
Pour bien comprendre le symbolisme du coq, il faut rappeler sa caractéristique frappante : réglé comme une horloge, il chante au lever du soleil. En général. Car le coq près de chez moi a du mal à respecter ce principe. Il préfère m’importuner au milieu de la nuit 🙂
Le symbole chrétien de la victoire et de la vigilance
Mis à part mon cas particulier, le coq représente le lever du jour. Un temps éminemment symbolique dans beaucoup de religions. C’est le moment où les ténèbres se dissipent et où la lumière s’impose. Le cri du coq marque donc le triomphe de l’aurore sur les démons de la nuit, ou plus métaphoriquement, la victoire de la vie sur la mort (la résurrection autrement dit). Autant de significations parlantes pour le chrétien.
Dans le christianisme, le coq symbolise aussi la vigilance. Dominant le village, il guette l’apparition du soleil au-dessus de l’horizon qu’il salue par son chant. Le coq est celui qui attend patiemment le retour du Christ sur Terre, à l’heure du Jugement dernier. Il sera le premier à voir l’imminence de l’événement.
Au XIIIe siècle, un liturgiste Guillaume Durand compare l’animal aux membres du clergé, à leur mission. Par leurs paroles, les curés et les évêques réveillent les âmes endormies et remettent le fidèle, toujours pêcheur, dans le droit chemin. Vigilants, ils s’assurent de les amener vers le salut, à l’image du coq s’occupant de ses poules.
Lire aussi :
Le coq des églises et le coq des Gaulois
On explique aussi que le coq se dresse au sommet des églises parce qu’il est l’étendard de la France. Les Gaulois l’auraient utilisé comme emblème. À l’appui de cette affirmation, on se plaît à rappeler que le mot latin « Gallus » signifie autant « gaulois » que « coq ».
Je mets les choses au clair. Non, le coq des églises n’a rien de patriotique. Si ce gallinacé était propre à la France, pourquoi en voyez-vous au-dessus des églises anglaises, espagnoles, allemandes, italiennes… ? Dans l’art chrétien, le coq est un symbole international.
Ce qui n’empêche pas que dans d’autres contextes, il puisse avoir une signification proprement nationale. Alors que les rois d’Angleterre montraient un lion sur leurs armoiries, les rois de France leur opposèrent un coq sur les leurs. Le volatile a fini par être l’allégorie du pays. C’est pourquoi il trône sur certains monuments aux morts. Enfin, son côté bagarreur en a fait l’emblème des équipes de France sportives : vous le voyez cousu sur les maillots des footballeurs, des rugbymen, des handballeurs… Mais vous comprenez qu’on ne se situe plus sur le terrain religieux.
- Lire cet article scientifique sur l’évolution du symbole du coq en France sur Persée.fr
- Lire cet article de Michel Pastoureau sur le coq médiéval et son histoire symbolique
En résumé,
- Depuis le Moyen Âge, le coq domine les clochers des églises de l’Europe occidentale et pas seulement de la France
- Annonçant le lever du soleil, le coq chasse symboliquement les ténèbres d’où sa figuration dans plusieurs religions, dont le christianisme
- Chez les chrétiens, il est aussi le symbole de la vigilance du clergé qui veille sur sa basse-cour de fidèles
Laisser un commentaire