La définition d’une basilique paraît confuse. Certains avancent que ce sont de grandes églises de pèlerinage. Selon d’autres, le terme renvoie à une architecture particulière : le plan basilical. Enfin, des églises sont présentées tantôt comme des cathédrales, tantôt comme des basiliques. Éclaircissements.
Pour faire simple, le terme de basilique recouvre deux définitions principales dans le christianisme :
- Au sens architectural, il correspond à un édifice particulier par son plan rectangulaire et par sa division en colonnades. La plupart des grandes églises catholiques adoptent cette disposition ou une variante.
- Au sens du droit canon (religieux), la basilique est un titre honorifique que le pape confère à certaines églises prestigieuses.
Je pourrais m’arrêter là. Cependant cette mise au point pose d’autres questions. Pourquoi les églises ont-elles adopté majoritairement ce plan basilical ? Sur quels critères le Saint-Siège se fonde-t-il pour honorer une église du titre de basilique ? Combien y a-t-il de basiliques dans le monde et en France ? Et qui gagnera les prochaines élections présidentielles américaines ? Vous saurez tout. Enfin presque.
Les premières basiliques chrétiennes
L’an 313 est une date primordiale dans l’histoire du christianisme. L’empereur Constantin rend alors légale cette religion d’origine orientale. Jusque-là, le culte était plus ou moins clandestin et ses adeptes parfois persécutés. Les chrétiens peuvent désormais disposer de lieux de culte officiels. L’empereur favorise lui-même cette promotion en faisant bâtir ou en aidant la construction de trois grandes églises à Rome même : Saint-Pierre, Saint-Jean-de-Latran, Saint-Laurent-hors-les-Murs. Ces 3 édifices sont tous appelés basiliques.
La raison ? Leur architecture s’inspire d’un bâtiment civil connu dans différentes villes de l’Empire : la basilique. Elle sert généralement de marché couvert et de tribunal. On y organise parfois des réunions publiques. Une sorte de couteau suisse du bâtiment ! Certaines demeures aristocratiques comportent aussi une basilique que leur propriétaire utilise comme salle de réception.
L’empereur, le pape ou les évêques reprennent cette architecture pour une bonne raison.
La basilique, une solution pratique
D’emblée, les premiers chrétiens écartent le modèle des temples romains. Leur configuration n’est pas pratique pour leur culte. Le christianisme a en effet une caractéristique banale à nos yeux, mais révolutionnaire à l’époque : les fidèles sont conviés dans le lieu de culte.
Dans les temples du paganisme, les adeptes se tiennent à l’extérieur lors des cérémonies. Seuls les prêtres entrent dans l’édifice sacré.
Dans les églises chrétiennes, tous les disciples doivent pouvoir pénétrer à l’intérieur pour assister au culte dirigé par le clergé. Il faut donc pousser les murs. Or au temps de l’Empire romain, deux types d’édifices sont particulièrement adaptés à l’accueil de foules : les édifices de spectacle et la basilique civile.
Les premiers (amphithéâtre, cirque…) avaient l’inconvénient de rappeler quelques douloureux souvenirs aux chrétiens : certains s’y étaient fait martyriser ou croquer par des lions. La basilique est donc adoptée.
La basilique, une architecture particulière
Les basiliques antiques sont des bâtiments plutôt rectangulaires, divisés en plusieurs vaisseaux par des files de colonnes. Généralement, on compte trois vaisseaux : une nef centrale, plus élevée, et des bas-côtés. Cette disposition vous est familière. Elle correspond encore aujourd’hui à celles de la majorité des grandes églises catholiques. Un transept ou l’ajout de chapelles sont seulement venus compliquer ce plan de base.
Au bout de la basilique, le mur s’incurve pour dessiner une abside semi-circulaire. Dans les basiliques civiles s’y tenait le magistrat chargé de la justice ou l’aristocrate. Les chrétiens détournent son usage pour y placer un autel et y peindre une image du Christ sur la voûte.
Dans les premiers siècles du christianisme (l’époque dite paléochrétienne), les lieux de culte majeurs prennent donc le nom de basilique. Ce n’est qu’à partir du IXe siècle, que le terme « église » (ecclesia en latin) s’impose. La désignation de basilique se restreint alors à quelques monuments particulièrement prestigieux (Saint-Pierre de Rome, la cathédrale de Florence, Saint-Denis…).
À la fin du XVIIIe siècle, la papauté sort cette notion de l’ombre pour lui donner une nouvelle signification.
La basilique, un titre devenu honorifique
Le 6 avril 1892, Mgr Berthet, l’évêque de Gap, dans les Hautes-Alpes, est un homme heureux. La lettre qu’il tient dans les mains, marquée du sceau du Saint-Siège, lui annonce une grande nouvelle :
« Dans l’exercice de notre autorité apostolique, nous enrichissons l’église dont nous avons fait l’éloge du titre de basilique mineure et nous lui conférons tous et chacun des droits, privilèges, honneurs et prérogatives qui lui reviennent ».
En clair, le Saint-Père Léon XIII promeut « basilique mineure » la modeste chapelle Notre-Dame-du-Laus, située dans le diocèse de Gap.
La distinction en tant que « basilique mineure » a été inventée par le pape Pie VI (1717-1799) pour honorer certaines églises particulièrement anciennes ou insignes. Depuis ce pontificat, plus de 1800 églises ont ainsi bénéficié de ce titre dont 173 (9 %) se trouvent en France. La liste ne cesse de s’allonger. Dernièrement, en 2019, le pape François a promu l’église Saint-Bonaventure de Lyon.
Comment être reconnu basilique mineure ?
Sans jeu de mots, le titre de « basilique mineure » ne tombe pas du ciel. Au préalable, l’évêque doit déposer une demande au Saint-Siège pour qu’une église de son diocèse soit reconnue.
Les candidatures sont étudiées selon des critères assez subjectifs. Si l’église candidate est un grand lieu de pèlerinage, la requête est facilement acceptée. D’où les promotions de Notre-Dame-de-Lourdes en 1874, de Notre-Dame-de-la-Salette en 1879, de Notre-Dame-de-Rocamadour en 1913, de Sainte-Thérèse de Lisieux en 1954…
Sinon le sanctuaire peut revendiquer son ancienneté, la possession de reliques importantes, un culte particulier (l’Immaculée Conception, le Sacré-Cœur de Jésus comme à Montmartre…). Même la beauté du site et la qualité architecturale de l’édifice peuvent entrer en compte. Aux évêques d’être convaincants sur la dignité de leur église. Le site religieux qui coche plusieurs de ces critères augmente bien sûr ses chances.
Tout type d’église peut prétendre à la distinction, même une chapelle. Ce qui explique que certains monuments portent deux titres. Saviez-vous par exemple que Notre-Dame de Paris était à la fois cathédrale et basilique ? C’est même la plus ancienne de France ! Malgré ce titre acquis dès 1805, soit un an après le sacre de Napoléon à l’intérieur, nous continuons à l’appeler cathédrale. Sûrement le poids de la tradition.
Les privilèges d’une basilique mineure
Le titre de basilique assure à l’église une plus grande renommée. Au-delà de cette retombée symbolique, il offre quelques privilèges au sanctuaire. Le Saint-Siège lui remet :
- Le pavillon pontifical (ou ombrellino), une sorte de parasol à semi-ouvert, aux bandes de toile jaune et rouge, les couleurs du Vatican
- Le tintinnabule, une clochette fixée à une monture qui porte les armoiries de la basilique
Cherchez-les ! Ces objets sont souvent disposés de part et d’autre du chœur. Sinon, ils sont portés au-devant des processions.
Résumé
Dans les premiers siècles du christianisme, la basilique désignait un édifice dont l’architecture s’inspire de la basilique civile des Romains. Des files de colonnes partagent l’espace en plusieurs vaisseaux, le vaisseau central étant le plus élevé.
Au Moyen Âge, on appelait basiliques quelques monuments chrétiens prestigieux.
Aujourd’hui, une basilique, mineure précisément, est un titre honorifique que le pape attribue à certaines églises en raison de leur importance religieuse (pèlerinage ou autre). Notre-Dame de Paris en est une. On se moquera de vous si vous parlez de la « basilique Notre-Dame de Paris ». Vous n’en aurez pas moins raison !
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