Par rapport à la France, les églises norvégiennes tranchent par leur style, leur matériau de construction et leur âge. Direction le pays des fjords où les habitants ont une vision moins conservatrice du patrimoine.
Je reviens d’un voyage en Norvège. Ce n’est pas le genre de pays particulièrement recommandé pour son patrimoine religieux. Mais vous le savez maintenant, dès que j’aperçois un clocher, je ne peux pas m’empêcher d’aller voir. Premier constat : la Norvège possède quelques églises remarquables et surtout très différentes des monuments français. Ce qui nous semble une norme chez nous ne l’est pas à l’autre bout de l’Europe.
Les Norvégiens se démarquent aussi par la gestion de leur patrimoine ancien. Certaines de leurs pratiques feraient hurler en France.
Peu d’architecture romane et gothique
Christianisés depuis l’an 1000 environ, les Norvégiens n’ont pas construit leurs églises dans l’un ou l’autre des deux grands styles du Moyen Âge : l’architecture romane ou gothique. Sauf dans une poignée de villes : la cathédrale de Nidaros à Trondheim, celle de Stavanger, l’église Sainte-Marie à Bergen…
Mais alors quel est le style médiéval norvégien ? Ce sont des églises dites en bois debout (stavkyrkje en langue locale). Les murs sont constitués de larges planches de bois, encastrés entre deux puissants poteaux ronds.
Cependant, la décoration de ces édifices, faite d’un entrelacs de végétaux, se raccroche à l’art roman. L’encadrement des portes est en effet sculpté de motifs rappelant les lettrines enluminées dans les manuscrits du Moyen Âge. Au sein de ces enroulements complexes se nichent des oiseaux.
Des églises plutôt récentes
De ces églises en bois debout, il n’en reste plus que 28 à travers la Norvège alors qu’elles étaient plus de mille. Ah, si les Norvégiens avaient construit comme nous Français, en pierre, leur édifice aurait mieux survécu.
Fausse idée ! Le pin scandinave s’avère un matériau beaucoup plus durable qu’on le pense. Séché plusieurs années après abattage, le bois se maintient des siècles grâce à la résine qui se durcit à l’intérieur.
Alors pourquoi une telle hémorragie parmi les églises en bois debout ? Il semble qu’après la Grande Peste de 1347-1350, la population norvégienne ait baissé de moitié. Faute de paroissiens, beaucoup d’édifices ont été abandonnés et sont tombés en ruine.
On en a reconstruit une fois compensée la perte démographique, soit quelques siècles plus tard. Les églises norvégiennes sont donc plutôt récentes (XVIIe-XIXe siècles).
Une autre conception du patrimoine
La disparition des églises médiévales s’explique aussi par un relatif désintérêt des Norvégiens pour leur patrimoine religieux. Dans ce pays scandinave, ce qu’il faut surtout préserver, c’est la nature, les paysages sauvages. Au point que la sauvegarde des monuments historiques n’est pas confiée à l’État, mais à une association. Association qui assure notamment son financement en faisant payer l’entrée des églises anciennes. Inconcevable en France.
En Norvège, on se permet d’autres pratiques qui feraient scandale chez nous. Pour conserver un monument en voie de dégradation, les Norvégiens n’hésitent pas à le déplacer dans un lieu où il sera mieux entretenu. Ainsi la superbe église en bois debout de Gol a été transplantée jusqu’au musée de la culture norvégienne à Oslo, soit à plus de 150 km. J’ai connu en France des habitants se déchirer parce qu’on voulait simplement déplacer un monument aux morts de quelques mètres. En Norvège, on n’a pas ce genre de scrupules.
Au final, je repars de Scandinavie plutôt déçu par l’offre d’églises. Mais qu’importe, je n’y allais pas dans ce but. La Norvège vaut par ses magnifiques paysages : fjords profonds, toundra des sommets montagneux, rivières aux eaux transparentes et agitées, vous en prendrez plein les yeux.
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